Variétés révolutionnaires
320 VARIÉTÉS RÉVOLUTIONNAIRES disait rien qui vaille. Il la laissa à son frère l'infortuné Louis, le Ménélas hollandais.
Lucien dut supporter un plus sérieux assaut matrimonial. L'infante d'Espagne, duchesse de Parme, dont il avait contribué à faire une reine d'Etrurie, venait de perdre-son mari. Bonaparte, d'accord avec la cour de Madrid, décida de faire épouser cette jeune veuve à son frère. Il faut lire dans les Mémoires le récit de cette négociation et les dialogues à la Henry Monnier entre Napoléon, Joseph et Lucien. Ce dernier résista comme un beau diable, disant que son républicanisme lui interdisait d'épouser une Bourbon, fort laide d’ailleurs, « une femme pourtant très propre », disait le Premier Consul. La vraie raison de son refus obstiné, Lucien l'avoua à Joseph : il avait donné son cœur à la belle Alexandrine de Bleschamp, veuve d’un aventurier nommé Jouberthon, mort aux colonies. Lucien avait rencontré la citoyenne Jouberthon dans une partie fine chez son ami Laborde ; il l'installa au Plessis-Chamant, et un mariage secret unit les deux amoureux à la veille de la naissance d'un enfant. Bonaparte, qui croyait simplement à une liaison passagère et qui, peu habitué à trouver des cruelles, gardait sur le cœur, paraît-il, les dédains de Mme Jouberthon, reçut la nouvelle officielle du mariage pendant un concert à la Malmaison. Il se mit à jurer, traitant érûment de « coquine » la belle-sœur qui lui tombait ainsi des nues, et envoya Murat, au milieu de la nuit, annoncer à Lucien que jamais il ne reconnai-