Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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veillard qui s’y promenait. Tandisque les femmes et lesenfans, effrayés, poussent mille cris, le canontire et tout Paris est sur pied ét crie aux armes; le tocsin sonne ; les citoyens enfoncent les boutiques des armuriers. Ils battent une compagnie de Roÿal-Allemand, et l'émotion continue durant toute la journée jusqu'à ce que, la nuit étant survenue, des brigands, apostés hors de Paris, brûlent les barrières, entrent dans la ville, et courent les rues, que remplissaient heureusement des patrouilles de citoyens, de gardes-françaises et de soldats du guet. Tout-à-coup une héureuse pensée était venue à quelques bons citoyens; elle devint un foyer de lumière et sauva la ville de Paris. Paris avait deux cents mille bras pour le défendre, mais il n’y avait point de têtes pour commander. À la voix d’ün citoyen généreux les électeurs sont convoqués ; au péril de leur vie ils s'emparent avec courage de l'autorité, et Les citoyens leur obéissent avec confiance.

Durant cette journée de deuil et de consternation les conspirateurs se livraient aux mouvemens d’une joie criminelle. A Versailles, dans cette orangerie où étaient logés, ou, pour mieux dire, embusqués les soldats allemands de Nassau, auson de leurs instrumens s’égayaient des princes, des princesses, des favoris, des favorites. Ils comblaient les soldats de caresses et de présens ; ét ceux-ci, dans leurs brutales orgies, se promettaient la dispersion de l'assemblée nationale et lasservisseent du royaume. Nuit désastreuse où des courtisans mêlaient leur danse a son de cette musique étrangère et se réjouissaient à la pensée du massacre !

Le lendemain le jour n’eut pas plutôt paru, que les citoyens de Paris suivirent avec activité leur projet de la veille. Des brigands avaient pillé la maison de St-Lazare : on les chasse ; les tocsins sonnent:'chacun se rend dans son district pour se faire inscrire ; on dépose la commune pour en former une nouvelle; on prend tous les fusils des armuriers ; on forge des épées, des sabres, des haches, des piques, des instrumens de toute espèce: le garde- meuble est forcé, et chacun ernporte ce qu’il peut des armures antiques qui y étaient déposées: on prend trente mille fusils cachés dans l’hôtel des Invalides ét six pièces de canon; et le lendemain soixante mille hommes étaient armés, enrôlés, distribués par compagnies , tandis que les électeurs, infatigables, prenaient des soins pour que le cours des subsistances ne fût pas interrompu.

Dans le même temps l'assemblée nationale envoyait au roi pour l’avertir du danger que courait la chose publique si les troupes n'étaient éloignées de la capitale; et les députés offraient d’aller à Paris se jeter entr’elles et les citoyens. Mais le roi lui répondait que lui seul pouvait juger de la nécessité