Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

CONSTITUANTE. 5z

ne sais quel ordre s'établit en tous lieux au milieu des craintes, de l'espoir , de l'ivresse de la liberté, de la destruction des pouvoirs, et de tout un peuple qui se remue dans l'espérance d’être mieux. Dans les campagnes, la colère se manifeste contre les seigneurs; on brûle des châteaux, on détruit des archives, et des vengeances particulières se mêlent à la vengeance publique. C'était la continuation de cé mouvement universel du tiers-état qui se débattait contre la tyrannie et les priviléges réunis, qui ne savait employer d’autre instru ment que celui qu'il avait entre les mains, la force. La cour faisait payer cher à ceux qu’elle avait appelés à son secours les affreux services qu’elle avait paru vouloir leur rendre.

Cependant et dès le moment où le roi avait rendu aux esprits, sinon l'espérance, au moins le calme, l’assemblée nationale s’était occupée de la constitution, et elle avait nommé des comitéspour distribuer lesdiverstravaux. En même temps elle faisait une proclamation pour calmer les esprits etarrêter les effets d’une impétuosité de vengeance dont la suite ne pouvait être calculée Elle recevait les vœux d'adhésion de tous les Français, les hommages de tous les corps, et même des cours souveraines, qui enfin reconnaissaient, aux éclats de la voix publique , l’autorité des représentans de la nation. Elle faisait usage de cette autorité pour appaiser les troubles qui s’élevaient en divers lieux et pour réprimer l'arrestation arbitraire de ceux que les citoyens jugeaient suspects. Elle ordonnait la liberté de la cireulation des subsistances ; qu'arrélaient en certains endroits la malveillance d’une part et Pignorance de l’autre.

C’est au milieu de cette immense agitation que M. Necker traversa la France et revint à Paris. Par-toutil recuties preuves les plus éclatantes de la joie universelle. On voyait en lui le ministre nécessaire et le martyr de la cause publique à laquelle la cour elle-même avait eu la mal-adresse de l'unir. Les plus beaux triomphes de M. Necker lui ont toujours été ménagés par ses ennemis. Paris le reçut avec ivresse : il obtint de l'enthousiasme des électeurs une amnistie générale pour tous ceux qui étaient soupçonnés de conspiration contre le peuple, Mais leurs pouvoirs nes’étendaient pasjusques-là, ils furent désavoués et obligés d'interpréter leur arrêté. Il était dangereux en effet que des citoyens de Paris pussent arrêter les poursuites contre les coupables de lèsé-nation. L'assemblée nationale ordonna la détention de M. de Besenval, principale cause de la démarche de M. Necker, et qui futélargi dans la suite sur ce qu’il n’y eut point de preuves contre lui.

La fermentation des esprits était cependant portée au com-