Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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cilité et de se reconnaître de la force, em abusait contre ses oppresseurs, et sa liberté nouvelle n’était encore que de la li cence. Les erreurs d’une haîne générale cherchaient par-tout à punir des ennemis dénoncés au hasardou par la prévention. Une inquiétude continuelle agitait tous ces hommes libres d'hier ; dans le besoin d'un nouvel ordre de choses et d’une . souveraine justice, ils se la faisaient eux-mêmes; et plusieurs . assassinats tumultuaires furent l'effet de ce délire. Le fardeau de tant de droits oppressifs, de tant d’impôts dont les campagnes étaient surchargées, et dont elles avaient demandé le soulagement, leur parut si lourd alors, qu’elles le jetèrent. L'assemblée nationale elle-même renfermait dans son sein , depuis le premier jour, le germe des deux partis qui divisaient la France; et l'explosion de ces deux haînes contraires avait accru l'intensité de chacun d’eux. Un sentiment ÿ dominait cependant, c'était la crainte des effets que pouvait produire une monarchie trop long-temps prolongée.

Elle agitait la fameuse déclaration des droits, à laquelle il faut laisser désormais le soin de se justifier elle-même : mais les troubles des provinces Vobligèrent de s’en distraire pour donner un arrêté qui obligeâttous les citoyens derentrer dans l’ordre, de payer des impôts et des droits qui n'étaient pas supprimés, et d'obéir aux lois, quand M. de Noailles vint attirer son attention. Il représenta que l’assemblée ferait des décrets inutiles contre les mouvemens tumultueux du peuple, si elle n’en détruisait la cause: que cette cause était dans les droits appressifs que le peuple payaït; et que le remède était de l’en décharger, de décréter que tous les impôts seraient également répartis ,queles droits féodaux seraient rachetables, et que les servitudes personnelles seraient détruites sans ra chat. Un autre membre de la noblesse appuya cette proposition ; c'était M. d’Aiguillon : il représenta qu'avant de donner une constitution à la France, il fallait lui donner des bienfaits, et justifier le zèle de l'assemblée par des sacrifices éclatans que toute la noblesse s’empresserait sans doute d’imiter. Alors eut lieu cette scène mémorable du 4 août, dans laquelle, en une seule nuit, tous les priviléges, tous les droits abusifs , farent abolis; scène si mal jugée par ceux qui n’observent pas que ces sacrifices étaient ou ordonnés par les cahiers, ou évidemment nécessaires à l'exécution du projet d’une nouvelle constitution. Ce n’en fut pas moins un superbe spectacle que celui des nobles etdu clergé sacrifiant les droits de chasse , de pêche, de garenne , et de colombier ; des curés offrant le sacrifice de leur casuel, des bénéficiers déclarant qu'ils se borneraient à un seul bénéfice; des seigneurs reconnaissant la nécessité du rachat des droits féodaux qui pe-