Étude sur les idées politiques de Mirabeau
LES IDÉES POLITIQUES DE MIRABEAU. 103
neau) qui recueillit sa succession !. En entrant au service du roi, le comte de Mirabeau n’avait pas de scrupules à accepter des gages qui ne lui furent pas d’ailleurs maintenus. Car ces premières négociations n’avaient pour la cour rien de sérieux et elles cessèrent bientôt ?.
On songeait à se débarrasser de Mirabeau, fût-ce même en lui donnant la lointaine ambassade de Constantinople. Quant à lui il n’aspirait à rien moins que d'entrer au Conseil du roi. Comptant sur l'appui de Monsieur et de La Fayette, comme sur la coopération de Talleyrand, de Liancourt et même de Montmorin et de Cicé, il avait la tête remplie de combinaisons ministérielles. Le roi ne dédaignait pas de l’amuser à ce jeu et c'était en vain que La Marck, au courant de la comédie, tächait de détromper son trop confiant ami. Ce fut cependant de l’Assemblée que partit le coup qui fit crouler les espérances du grand orateur. Ses collègues, déjouant son ambition, votèrent la motion de Lanjuinais, par laquelle un représentant du peuple ne pouvait accepter un portefeuille ministériel (7 novembre 1789)4.
Ce fut un vote funeste, et pour la cour, qui perdait aïnsi la seule chance qui lui restàt d'acquérir son plus grand ministre, et pour Mirabeau, qui devait renoncer à devenir jamais le conseiller officiel de la monarchie. Il fut si désespéré qu’il songea d’abord à partir et à demander une mission pour Constantinoples. Mais bientôt toutes ses colères se porterent contre le cabinet. Il avait découvert l’homme qui avait armé la main de Lanjuinais : c'était Necker. Le financier génevois était ainsi sorti vainqueur de la lutte qu’il soutenait depuis si longtemps contre le député provençal. Aussi Mirabeau ne mit-il plus de bornes à ses attaques contre le ministère et contre les amis du ministère. Il rompit violemment avec La Fayettef et s’acharna, en particulier, contre
{. Loménie. Les Mirabeau (Correspondant du 25 décembre 1873, v. LVII, p. 1163).
2. Dumont, p. 231.
3. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 387, 406-407, 410. La Fayette, v. II, p- 360, 432, 494-495. La Meth, v. I, p. 184. Thiers, v. I, p. 339.
4. Mon. Disc. du 27 octobre et du 7 novembre 1789. Courrier, n° 54, p. 19, n° 55, p. 6, 15 et 19. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 417. Lévis, p. 212. Dumont, p. 199. Taine, p. 175.
5. Lettres à Mauvillon, p. 489. La Fayette, v. II, p. 366.
6. Lettre à La Fayette du 1* décembre 1789. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 423-426, 442, 449 et 453. La Fayelte, v. II, 410.