Étude sur les idées politiques de Mirabeau
404 F. DECRUE,
Bournissac, le prévôt détesté des Marseillais, dont Mirabeau était l’élu!. Il trouvait ainsi le moyen de raffermir sa popularité ébranlée. À ce moment, en effet, ses discours témoignent d’un retour aux principes démocratiques purs. Il revendique les droits politiques des protestants et des juifs, ainsi que ceux des comédiens et des moines défroqués ; il appuie la création d’afeliers publics (soit nationaux) ; il fait refuser un million que la république aristocratique de Genève offrait au ministre des finances pour empêécher la banqueroute; il réfute enfin les prétentions féodales des princes possessionnés en Alsace?. Non seulement il ne voit plus ni les ministres, ni les membres de la noblesse libérale, mais ses amis eux-mêmes l’abandonnent. La Marck quitte Paris à ce moment, Dumont va bientôt partir. Pour le retenir sur la pente révolutionnaire, il n’y a plus que Monsieur à qui il continue d'adresser des notes; ce fut même Mirabeau qui lui conseilla d'aller désavouer le marquis de Favras, l’auteur du complot tramé pour enlever Louis XVI de Paris. Mais le prince ne consentait pas à jouer le personnage que Mirabeau lui destinait et se refroidissait à l'égard de cet allié compromettant {.
Mirabeau passa d’une année à l’autre dans un profond découragement5. Pendant l'hiver 1789-1790, il perdit toute activité. Il désespérait de la situation, et, dans les rares occasions où il prenait la parole, il battait en brèche les restes de l’ancien régime et menaçait l'autorité du gouvernement au point de lui ôter les moyens de résister à l'anarchie. Volney, son nouvel ami, le poussait dans cette voie. Cependant Mirabeau ne s’y engageait pas sans scrupules. Il regrettait même que le gouvernement déployât si peu d'énergie et que la cour fit preuve de tant d’indifférence’. « Jamais, disait-il, des animalcules plus imperceptibles
1. Mon. Disc. des 10, 20 octobre, 5, 6, 25, 27, 30 novembre, 1°, 2, 19, 22 et 26 décembre 1789. Courrier, n° 55, p. 14-15, n° 69, p. 7-21, n° 75, p. 19. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 387 et 433. Lettres à Mauvillon, p. 487.
2. Mon. Disc. du 29 décembre 1789, du 11 février et du 16 mars 1790.
3. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 132. Dumont, p. 243.
4. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 131, 455, 440, 451, Lettres à Mauvillon, p. 489. La Fayette, v. II, p. 392. Courrier, n° 83, p. 10-15. Martin, v. I, p. 114.
5. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 136-137, 427, 442, 454, 464.
6. Mon. Disc. des 9, 22, 25, 26, 30 janvier, 16, 17, 22, 23, 26 février et 18 mars 1790. Courrier, v. VI, p. 348 et 355. Dumont, p. 250.
7. Corr. Mirabeau-La Marck, v. 1, p. 436, 440-442, 447, 453, 456-457, 461, 464, 507-508.